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Journée nationale d’action du 13 mars 2000

Caméras partout, libertés nulles part !

A l’initiative des collectifs contre la vidéosurveillance de Levallois-Peret (Souriez vous êtes filmés) et Vaux-en-Velin (SOS vidéosurveillance), la journée du 13 mars devait être un point d’orgue d’une mobilisation contre cette technique dont nous avons déjà évoqué ici quelques aspects politiques et sociaux (Monde libertaire n°1148 et 1149). Sur ce problème, la militance de ces dernières années a toujours été en dents de scie, au gré de l’actualité et de l’usure des opposants submergés par la généralisation des caméras en lieu privé comme public. Difficile de ne pas réfléchir à deux fois avant de se lancer dans une mobilisation pareille quand on sait que pour le seul département du Gard, ce sont 310 dossiers d’installation de système de vidéosurveillance qui ont été examinés par la commission départementale qui se réunit depuis 1997. Et nous ne parlerons ici que des installations ayant fait l’objet de déclarations officielles…

Pour autant et jusqu’à aujourd’hui, les résistances perdurent, sporadiques ou plus enracinées. C’est dans cette perspective du long terme que se placent justement les différents acteurs de la journée du 13 mars.

Tour d’horizon

Caméra-flicÀ Vaux-en-Velin, le collectif local est mobilisé depuis plusieurs années contre une installation mise en place par Maurice Charrier, élu PCF, au mois de septembre 1997. Pour avoir initié plusieurs types de démarches protestaires (pétitions, conférences de presse, etc.), ils ont estimé qu’une réunion publique le 12 mars conviendrait pour apporter une contribution à la journée nationale. Les Verts, invités et présents à travers un de leurs porte-parole, ont réaffirmé leur opposition à la vidéosurveillance, ce qui n’empêche d’ailleurs pas un des leurs de la mettre en place dans un arrondissement lyonnais dont il est le maire ! Une quarantaine de personnes étaient présentes à cette réunion publique qui semble avoir satisfait le collectif organisateur.

À Limoges, c’est un collectif d’associations (Scalp, Ras-l’Front, SUD-PTT…) emmené par AC ! qui a tenu à marquer son opposition à la surveillance des précaires et chômeurs. Au cours d’une conférence de presse tenue le jeudi 11 mars à l’ASSEDIC du quartier du Roussillon, AC ! voulait pointer du doigt la généralisation de la construction de ces ASSEDIC dernier cri incorporant une architecture et un agencement qui intègrent notamment des portes de bureaux sans poignées et des caméras qui filment les usagers dans la salle d’attente. Du même coup, l’association de chômeurs évoquait la récente installation d’yeux électroniques au Samu social de la ville et dénonçait un licenciement intervenu dans un bureau de tabac qui a été rendu possible grâce à la surveillance à son insu de la salariée (16 ans d’ancienneté). Pour finir, le samedi, les militants des associations se sont organisés pour accrocher des ballons aux caméras qui balaient les rues de la ville. Les passants ont plutôt bien réagi, avouant leur manque d’information sur les emplacements des caméras et l’usage qui peut en être fait.

La Fédération anarchiste aussi

Au sud, ce sont les groupes de la F.A. qui ont emmené l’opposition à l’installation des yeux électriques. À Montpellier, et dans le cadre du plan local de sécurité, le maire PS (G. Frêche) doit compter sur les initiatives des anarchistes fédérés pour contrecarrer ses projets de vidéosurveillance. Depuis le début de la mobilisation, ce sont 600 signatures contre les caméras qui ont été recueillies ; une première réunion publique avait eu lieu et une seconde fut organisée à la salle Lacordaire de Montpellier le 10 mars avec une assistance de 50 personnes. Le 13 mars, près de 80 personnes ont participé au rassemblement place de la Comédie à 15 heures. Malgré les contacts pris, aucune autre association politique ou syndicale n’a participé à la mobilisation.

Dans le département voisin, le Gard, la F.A., forte de son expérience acquise au cours d’un collectif qui participa en 1995 à la mobilisation anti-caméras dans les rues de la petite ville (13 000 habitants). La place Clemenceau fut symboliquement rebaptisée « Place de l’œil de glace ». L’initiative ne rassembla que 20 participants dont à peine un tiers d’habitants de Beaucaire ! L’absence d’implantation militante libertaire peut en partie expliquer cette faible mobilisation. Même si, rapporté aux 80 personnes rassemblées à Paris, il convient de relativiser ce faible résultat. Notons au passage l’absence d’associations aux côtés des libertaires organisés, exceptions faites de Ras-l’Front et de la CNT qui avaient envoyé des représentants.

La capitale n’a donc pas réussi à faire le plein d’opposants alors que diverses associations (F.A., M.I.R., Scalp-Réflex…) avaient les moyens d’étoffer cette présence dans la rue et n’ont pas fait le plein de leurs troupes, les Verts, la CNT et Souriez vous êtes filmés fournissant le plus gros contingent de militants. Mais, malgré tout, ce rassemblement était nécessaire et a apporté sa contribution à la journée notamment en répondant aux sollicitations des journalistes présents.

Ce n’est qu’un début ?

Il y a fort à parier que cette journée d’action nationale ne sera qu’une étape dans cette lutte qui touche à la question de l’insécurité et du contrôle social. Sans doute, au sein des collectifs de la coordination qui reste très informelle pour l’instant, y a-t-il déjà des stratégies qui se mettent en place. L’une consistant à faire intervenir des groupes politiques (les Verts) présents dans les institutions dans le but de faire pression auprès des services de l’État via les parlementaires de la gauche plurielle ce qui ne peut se faire qu’au détriment de l’action directe et de la dynamique de terrain ; l’autre, celle de favoriser la mobilisation des gens pour faciliter l’auto-organisation et la radicalisation de ce type de lutte loin des logiques économiques, d’État et politiciennes responsables de l’accentuation de ce quadrillage à caractère policier.

En étant conscients de cette évolution, il nous reste à encourager et à enrichir les mobilisations à venir, la prochaine revenant à « Souriez vous êtes filmés » de Levallois-Perret. Ces opposants ont décidé d’intervenir au prochain conseil municipal de la ville où sera abordé le budget communal dont celui de la maintenance des caméras installées ; et une conférence de presse s’organise pour aborder la question de la vidéosurveillance sur les lieux de travail avec des témoignages de syndicalistes de la CNT à propos du conflit à la COMATEC (nettoyeurs du métro grévistes identifiés grâce à un prêt d’enregistrement de caméras de la RATP) de l’an dernier.

Daniel - groupe du Gard

http://federation-anarchiste.org le Monde Libertaire